Publié le 30/11/2020  Dans : La vie des entreprises  0 Commentaire   Vu 240 fois

Une stratégie pharmaceutique pour l'Europe: Questions et réponses

1. Pourquoi la Commission présente-t-elle cette stratégie maintenant?

La nouvelle stratégie pharmaceutique pour l'Europe est l'un des piliers essentiels de l'Union européenne de la santé, que la présidente von der Leyen a appelée de ses vœux dans son discours sur l'état de l'Union de 2020.

Cette stratégie contribuera à la construction d'une véritable Union européenne de la santé en s'attaquant aux faiblesses de longue date dans le domaine des médicaments, que l'actuelle pandémie de COVID-19 a exacerbées et mises en évidence. Les principaux enjeux concernent l'accès aux médicaments, leur caractère abordable et les pénuries de ceux-ci ainsi que la nécessité d'aider l'industrie pharmaceutique de l'UE à innover, à relever les défis de la durabilité économique et environnementale et à devenir un leader mondial dans un environnement mondial en rapide mutation.

Pour répondre à ces enjeux, la stratégie pharmaceutique portera sur le cycle de vie complet d'un médicament et couvrira ainsi des domaines aussi variés que la recherche et le développement de médicaments, les tests de laboratoire, les essais cliniques, l'autorisation de mise sur le marché, la fabrication, l'évaluation des technologies de la santé, la fixation des prix et le remboursement, l'accès, la protection de la propriété intellectuelle (PI) et la mise sur le marché des médicaments, y compris des génériques et des biosimilaires.

En outre, la stratégie permettra de garantir la prise en compte des dernières tendances scientifiques et des technologies numériques les plus récentes, telles que les progrès de la biotechnologie et l'utilisation de l'intelligence artificielle (IA).

Enfin, elle créera des synergies avec divers autres domaines d'action, tels que la recherche et l'innovation, la politique industrielle, la concurrence et les politiques commerciales et environnementales.

2. La stratégie tient-elle compte des enseignements tirés de la pandémie de COVID-19?

La pandémie de COVID-19 a mis en évidence les graves conséquences que pouvaient avoir les failles existantes des systèmes de santé en cas de crise. La stratégie pharmaceutique répondra tant aux problèmes à court terme posés par la COVID-19 qu'aux enjeux à plus long terme liés aux besoins médicaux non satisfaits, à une autonomie stratégique ouverte et à des systèmes de santé durables.

L'un des premiers enseignements de la pandémie est que l'UE doit renforcer ses outils de gouvernance et poursuivre le développement des mécanismes qui ont été mis en place dans le contexte de la COVID-19.

La capacité de l'UE à faire face à de tels événements et les leçons tirées de cette pandémie ont déjà été largement traitées dans le paquet «Union européenne de la santé» adopté par la Commission le 11 novembre dernier. En ce qui concerne les médicaments, la Commission a proposé de renforcer le rôle de l'Agence européenne des médicaments (EMA). L'EMA devra servir de plaque tournante centrale pour l'excellence scientifique et la coordination et contribuer au suivi, à la quantification et à l'atténuation des pénuries de médicaments essentiels pendant une crise, pour être plus efficace et éviter les doubles emplois à différents niveaux dans l'UE.

La stratégie pharmaceutique pour l'Europe viendra compléter le paquet «Union européenne de la santé» et évaluera la nécessité d'apporter d'autres améliorations à moyen et à long terme pour faire face à ces menaces de manière plus globale et coordonnée.

3. Quelle est l'importance du secteur pharmaceutique dans l'économie de l'UE?

L'industrie pharmaceutique revêt une importance capitale pour l'économie de l'UE.

En 2019, elle a investi plus de 37 milliards d'euros dans la recherche et le développement (R&D); elle représente 800 000 emplois directs et un excédent commercial de près de 110 milliards d'euros.

Par ailleurs, l'UE est le deuxième marché mondial des produits pharmaceutiques. Les dépenses pharmaceutiques totales de l'UE s'élevaient à environ 190 milliards d'euros en 2018. Les ventes totales de produits pharmaceutiques sont encore plus élevées si l'on inclut les médicaments utilisés dans les hôpitaux.

4. La stratégie est-elle liée à d'autres initiatives récentes de la Commission?

La stratégie présentera des synergies importantes avec d'autres grandes initiatives stratégiques de la Commission, telles que le pacte vert pour l'Europe, y compris la stratégie dans le domaine des produits chimiques en tant qu'élément constitutif du prochain plan d'action «zéro pollution», ainsi qu'avec la nouvelle stratégie industrielle pour l'Europe, le plan d'action pour la mise en œuvre du socle européen des droits sociaux et la stratégie sur l'avenir numérique de l'Europe. Plusieurs mesures proposées dans la stratégie pharmaceutique font le lien avec ces domaines d'action.

La création d'un espace européen des données de santé en est un autre exemple. Un système interconnecté donnant accès à des données de santé comparables et interopérables dans toute l'Union est un atout important pour les activités de recherche et de réglementation.

5. Comment le secteur pharmaceutique deviendra-t-il plus durable?

Pour répondre aux objectifs du pacte vert, le secteur pharmaceutique doit rendre ses activités plus durables. Des mesures doivent être prises tout au long du cycle de vie des médicaments pour réduire l'utilisation des ressources, les émissions et les niveaux de résidus pharmaceutiques dans l'environnement, notamment ceux provenant d'antibiotiques. Nous y parviendrons en renforçant et en complétant l'approche stratégique de l'UE concernant les produits pharmaceutiques dans l'environnement, ainsi qu'en modifiant la législation si nécessaire et en réexaminant les dispositions relatives à l'évaluation des risques pour l'environnement.

6. De quelle manière la stratégie interagit-elle avec le paquet «Union européenne de la santé» et le futur plan européen de lutte contre le cancer?

Il est indispensable de disposer de médicaments sûrs, efficaces et abordables tant en période de crise qu'en temps normal.

C'est exactement ce que la stratégie vise à garantir. Il s'agit, par conséquent, d'un aspect essentiel des efforts déployés pour construire une Union européenne de la santé forte, comme l'a proposé la Commission. Le premier train de mesures adopté par la Commission le 11 novembre dernier vise à rendre l'UE plus résiliente aux crises en faisant en sorte qu'elle agisse de manière coordonnée face aux menaces transfrontières sur la santé et qu'elle dispose des outils nécessaires pour trouver des solutions. La proposition de révision des mandats du Centre européen de prévention et de contrôle (ECDC) et de l'Agence européenne des médicaments (EMA) fait partie de cette réponse. La Commission a en particulier proposé de renforcer le rôle de l'EMA dans les domaines de la surveillance, de l'anticipation et de l'atténuation des pénuries d'approvisionnement en temps de crise. Elle propose également de renforcer la capacité de l'EMA à fournir une contribution scientifique solide pour la mise au point en temps utile des thérapies et des vaccins requis.

Par ailleurs, l'Autorité européenne d'intervention en cas d'urgence sanitaire (HERA), dont la création sera proposée l'an prochain, se concentrera sur l'analyse prospective et le développement d'une solide capacité de prévisions, ce qui nous permettra non seulement d'anticiper les menaces mais également de déterminer des contre-mesures prometteuses et innovantes.

La stratégie pharmaceutique soutient également l'objectif de prévention durable du cancer en mettant en place les mesures d'incitation nécessaires pour encourager l'innovation en vue de répondre aux besoins non satisfaits. Parmi ceux-ci figure la vaccination contre des infections traitables qui sont à l'origine de cancers. En mettant l'accent sur la nécessité de garantir des médicaments accessibles, abordables et disponibles, la stratégie soutient également les droits d'accès à des diagnostics et traitements de haut niveau. Tous ces éléments contribueront directement à la réalisation des objectifs de prévention et de traitement définis dans le cadre du futur plan européen de lutte contre le cancer.

7. La stratégie abordera-t-elle la question des pénuries de médicaments?

La Commission reconnaît que la pénurie de médicaments est un problème de longue date qui a de graves conséquences sur la santé publique.

Dans la majorité des cas, les pénuries deviennent plus fréquentes pour les produits qui sont présents sur le marché depuis de nombreuses années et dont l'usage est répandu. Dans d'autres cas, les pénuries résultent de la fragilité des chaînes d'approvisionnement, d'un nombre insuffisant de fournisseurs ou de l'absence d'incitations commerciales à développer des médicaments bon marché et en faibles quantités. Ceci est particulièrement problématique pour les marchés les plus petits et les moins riches.

Cette situation s'explique, entre autres facteurs, par les stratégies de commercialisation, le commerce parallèle, la faiblesse des obligations de service public, les quotas d'approvisionnement et les politiques de tarification et de remboursement.

Par conséquent, la Commission procèdera à une révision de la législation pharmaceutique de base en vue de renforcer la sécurité d'approvisionnement et de remédier aux pénuries. Afin de réduire au minimum l'incidence des pénuries de médicaments sur les soins prodigués aux patients, des mesures de prévention et d'atténuation seront nécessaires.

En outre, et en réponse directe à la crise liée à la COVID-19, il est proposé dans le paquet «Union européenne de la santé», adopté par la Commission le 11 novembre 2020, de surveiller et d'atténuer les pénuries de médicaments en période de crise sanitaire et de renforcer les capacités de l'EMA.

Le mandat de la future Autorité européenne d'intervention en cas d'urgence sanitaire soutiendra le développement et le déploiement de produits médicaux de pointe ainsi que d'autres technologies majeures.

Enfin, les pouvoirs publics doivent assurer une surveillance renforcée de la chaîne d'approvisionnement et de la qualité des médicaments et des matières premières afin de recenser les vulnérabilités et les dépendances stratégiques sans compromettre les avantages du commerce mondial et des chaînes de valeur intégrées.

8. La stratégie conduira-t-elle à une relocalisation de la production de médicaments vers l'UE?

Parvenir à une autonomie stratégique tout en préservant une économie ouverte fait partie des objectifs clés de l'Union.

Ainsi que l'a demandé le Conseil européen, la Commission recensera les dépendances stratégiques et proposera des mesures visant à les réduire, lesquelles pourront notamment consister à diversifier les chaînes de production et d'approvisionnement, à garantir la constitution de stocks stratégiques et à encourager la production et les investissements en Europe.

Il s'agit toutefois d'une question très complexe qui nécessite la collecte de données supplémentaires et une évaluation plus poussée. La Commission lancera donc un «dialogue structuré» avec les acteurs de la chaîne de valeur de la fabrication de produits pharmaceutiques et les pouvoirs publics afin de recenser les vulnérabilités de la chaîne d'approvisionnement mondiale et d'aider à formuler des options stratégiques pour renforcer la continuité et la sécurité de l'approvisionnement dans l'Union.

9. La stratégie répondra-t-elle aux préoccupations liées au caractère abordable et à la hausse constante des prix de certains produits?

Le système actuel de l'UE repose sur le principe que l'innovation dans les médicaments devrait être récompensée par un système de brevets qui limite la concurrence et l'entrée de génériques. À l'expiration d'une période d'exclusivité, la concurrence est rétablie et les génériques peuvent être mis sur le marché à un prix inférieur, ce qui augmente les possibilités de traitement disponibles.

Cependant, ce système subit de plus en plus de pressions.

Par exemple, de nouveaux médicaments onéreux font augmenter les dépenses pharmaceutiques et coûtent cher à nos systèmes de santé. Pour plus de 50 % des ménages de l'UE, le coût des médicaments représente une charge financière, parfois lourde. Les États membres font de plus en plus face à des incertitudes quant à l'efficacité réelle de nouveaux médicaments et aux coûts globaux y afférents. De surcroît, la concurrence, en principe censée faire baisser les prix et, partant, accroître le caractère abordable, devient plus complexe au fil du temps car les nouveaux types de produits constituent une part croissante des budgets.

La stratégie pharmaceutique propose donc, à l'échelon de l'UE, des mesures visant à promouvoir le caractère abordable des médicaments et la viabilité de nos systèmes de santé.

La Commission soutiendra la coopération entre les autorités nationales en matière de tarification, de paiement et de passation de marchés, afin d'améliorer le caractère abordable des médicaments et leur rapport coût-efficacité ainsi que la viabilité des systèmes de santé. Elle contribuera également à améliorer la transparence des méthodes utilisées pour déterminer les coûts de recherche-développement des médicaments.

Les autorités publiques nationales pourront ainsi améliorer leurs capacités et prendre de meilleures décisions pour les trois années à venir et au-delà. Cela permettra également aux fabricants de produits à haute valeur ajoutée de mieux plaider leur cause et aux patients de l'UE d'accéder, en temps utile, à des médicaments d'un bon rapport coût-efficacité de manière équitable et abordable.

10. Quelle est l'importance de l'innovation dans le cadre de la stratégie?

L'innovation est un élément clé de la stratégie.

Depuis l'élaboration et l'adoption de la législation pharmaceutique actuelle, la «quatrième révolution industrielle» nous montre que la science est en constante évolution et que les nouvelles technologies et la numérisation offrent de nouvelles possibilités. Nous observons, par exemple, une augmentation de produits combinant des médicaments à des dispositifs médicaux et/ou des composants de l'intelligence artificielle (IA).

Les avancées en génomique, en médecine personnalisée et autres domaines doivent être prises en compte dans l'élaboration de futures politiques pharmaceutiques. Par exemple, les vaccins contre la COVID-19 mis au point à partir de nouvelles techniques (ex.: ARNm) montrent dans quelle mesure les tendances innovantes peuvent transformer les méthodes de développement traditionnelles et réduire les délais. Les médicaments de thérapie innovante en sont une autre illustration.

Dans ce contexte, la législation pharmaceutique actuelle pourrait nécessiter une révision afin d'éviter les goulets d'étranglement ou les lacunes réglementaires et d'encourager l'innovation, de favoriser de nouvelles avancées et de stimuler la compétitivité de l'UE.

La Commission veillera à ce que le nouveau cadre soutienne des modèles d'essai innovants. En outre, en coordination avec les régulateurs européens, les groupes de patients et les parties prenantes, elle favorisera un modèle, une planification et une conduite relatifs aux essais cliniques davantage axés sur les patients. Cela pourra se faire grâce à des orientations internationales harmonisées et sur la base de l'expérience acquise lors des essais cliniques de vaccins et de traitements contre la COVID-19.

11. Quel est le lien entre la stratégie pharmaceutique et le plan d'action en matière de propriété intellectuelle?

Les droits de propriété intellectuelle, en particulier les brevets et les certificats complémentaires de protection (CCP), protègent les produits médicaux innovants et déterminent le moment auquel les produits concurrents peuvent entrer sur le marché. Encourager l'innovation tout en garantissant l'accès, la disponibilité et le caractère abordable des médicaments est un aspect essentiel de la stratégie pharmaceutique.

Le système de propriété intellectuelle de l'UE fonctionne en tandem avec le système européen d'incitations pharmaceutiques (ex.: protection du marché, protection des données), tous deux contribuant ainsi à la réalisation desdits objectifs.

Certaines initiatives actuellement envisagées par la Commission, telles que la modernisation du système (CCP), concernent tant la propriété intellectuelle que les politiques pharmaceutiques. Toute révision des règles relatives à la propriété intellectuelle et aux incitations pharmaceutiques reconnaîtra la complémentarité de leurs effets sur la nécessité d'encourager l'innovation et de rendre les médicaments accessibles et disponibles à un prix abordable pour tous les patients.

12. Quand la Commission proposera-t-elle la création d'une Autorité européenne d'intervention en cas d'urgence sanitaire? À quoi ressemblera-t-elle?

La création de cette agence a été annoncée par la présidente von der Leyen dans son discours sur l'état de l'Union en septembre 2020 et fait partie du paquet «Union européenne de la santé» adopté le 11 novembre dernier.

La Commission travaille actuellement à l'élaboration d'une proposition qu'elle entend présenter aux États membres et au Parlement européen au cours du second semestre de 2021.

L'agence aura pour objectif général la coordination des opérations tout au long de la chaîne de valeur et des investissements stratégiques en faveur de la recherche, du développement, de la fabrication, du déploiement, de la distribution et de l'utilisation de contre-mesures médicales. Elle soutiendra la capacité et l'état de préparation de l'UE face aux menaces et aux situations d'urgence transfrontières en mettant l'accent sur les menaces chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires, les maladies émergentes et la grippe pandémique.

La Commission étudie actuellement les fonctions et les possibilités de structure de cette Autorité. Elle lancera une analyse d'impact et une consultation sur la création de cette autorité européenne en vue de proposer en 2021 la mise en place d'une structure dûment mandatée et dotée de ressources suffisantes pour commencer à fonctionner en 2023.

13. Quelles sont les prochaines étapes en ce qui concerne la stratégie? Quand la Commission entend-elle présenter une révision de la législation pharmaceutique?

La stratégie sera examinée au niveau politique lors de la session du Conseil EPSCO du 2 décembre 2020.

Elle sera mise en œuvre immédiatement après son adoption, avec les mesures, les projets pilotes et les études annoncés dans la communication, y compris le processus d'évaluation des actes législatifs de base relatifs aux médicaments.

Elle comprendra des mesures législatives et non législatives qui suivront les principes habituels d'amélioration de la réglementation (notamment l'évaluation et l'analyse d'impact).

Les mesures seront déployées progressivement, à commencer par les premières propositions au cours des prochains mois, notamment la révision de la législation sur les médicaments destinés aux enfants et le traitement des maladies rares (règlements relatifs aux médicaments orphelins et aux médicaments à usage pédiatrique).

En outre, des mesures seront prises dans des domaines non pharmaceutiques qui revêtent de l'importance pour la réalisation des objectifs de la stratégie (par exemple, le développement de la stratégie européenne pour les données ou le perfectionnement du système européen des droits de propriété intellectuelle, tels que les brevets).

En fonction du processus d'évaluation, il est prévu dans la stratégie qu'une proposition de révision des actes législatifs de base relatifs aux médicaments* soit présentée à la fin de 2022.

* Directive 2001/83/CE et règlement (CE) n° 726/2004.

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