Publié le 28/04/2021  Dans : La vie des entreprises  0 Commentaire   Vu 255 fois

28 millions € d'amendes à des banques d'investissement

La Commission européenne a infligé à la Bank of America Merrill Lynch, au Crédit Agricole et au Crédit Suisse des amendes d'un montant total de 28 494 000 € pour infraction aux règles de l' UE en matière d'ententes et d'abus de position dominante. Aucune amende n'a été infligée à la Deutsche Bank, car c'est elle qui a révélé l'existence de l'entente à la Commission.

Les quatre banques ont participé à une entente sur le marché secondaire, au sein de l'EEE, des obligations supra-souveraines, des obligations souveraines et des obligations d'organismes publics (Supra-sovereign, Sovereign and Agency – SSA) libellées en dollars des États-Unis.

Margrethe Vestager, vice-présidente exécutive de la Commission, chargée de la politique de concurrence, a fait la déclaration suivante: «Nous avons adopté aujourd'hui une décision à l'encontre de la Bank of America Merrill Lynch, du Crédit Agricole, du Crédit Suisse et de la Deutsche Bank, dont les traders se sont entendus sur les stratégies de négociation, ont échangé des informations sensibles sur les prix et ont coordonné leurs prix. Le comportement des banques d'investissement a restreint la concurrence sur un marché où les fonds d'investissement et de pension achètent et vendent régulièrement des obligations pour le compte de leurs investisseurs ou de leurs prestataires. L'entente a porté préjudice aux marchés financiers et la décision d'aujourd'hui envoie un message clair: la Commission ne tolérera aucun type de comportement collusoire.»

Les quatre banques d'investissement ont participé à une entente par l'intermédiaire d'un noyau dur de traders attachés à leur division respective chargée des obligations SSA libellées en USD et qui étaient en contact régulier les uns avec les autres. Une obligation est un type de titre de créance qui permet à des entités de lever des liquidités. Les obligations sont émises sur le marché primaire puis négociées par des établissements financiers sur le marché secondaire. Sur le marché secondaire, les clients potentiels, tels que les fonds d'investissement et les fonds de pension, s'adressent aux banques pour obtenir une offre de prix indépendante et connaître la quantité disponible d'obligations d'un émetteur donné. Les obligations peuvent être libellées en différentes devises. Dans le cas présent, il s'agit d'obligations SSA émises en dollars des États-Unis.

Les traders, qui étaient en concurrence directe, se connectaient généralement à des salles de discussion multilatérales ou bilatérales sur les terminaux de Bloomberg. Ils se connaissaient personnellement, ce qui créait un cercle de confiance fermé. Ils se tenaient régulièrement informés de leurs activités de négociation, échangeaient des informations commerciales sensibles, se coordonnaient sur les prix communiqués à leurs clients ou au marché en général, et harmonisaient leurs activités de négociation sur le marché secondaire pour ces obligations. Ce comportement a eu lieu pendant une période de cinq ans et a affecté la négociation d'obligations SSA libellées en dollars des États-Unis sur le marché secondaire de l'ensemble de l'EEE.

L'enquête de la Commission a révélé qu'en plus de coordonner les prix qu'ils proposaient à certains clients ou sur le marché en général, les traders ont parfois convenu:

  • de s'abstenir de présenter une offre d'achat ou de vente, ou de retirer du marché (de «tuer») une offre d'achat ou de vente, lorsqu'ils auraient pu entrer en concurrence les uns avec les autres;
  • de se répartir les négociations entre eux et de combiner ou de réduire leurs positions respectives pour répondre à la demande d'un client donné, sans que le client ne sache qu'il traitait avec plus d'un négociant. En pratique, cela limitait le choix proposé au client.

Le comportement des quatre banques constitue une infraction aux règles de l'UE qui interdisent les pratiques commerciales anticoncurrentielles telles que la collusion sur les prix (article 101 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et article 53 de l'accord EEE).

À l'instar d'affaires antérieures portant sur des ententes affectant la négociation d'instruments financiers, la décision d'aujourd'hui démontre que la Commission reste déterminée à s'attaquer aux pratiques anticoncurrentielles sur tous les marchés, y compris dans le secteur financier.

Amendes

Les amendes ont été fixées sur la base des lignes directrices de la Commission pour le calcul des amendes de 2006.

Pour fixer le niveau des amendes, la Commission a tenu compte, en particulier, de la valeur des ventes réalisées dans l'EEE par les membres de l'entente pour les produits en question, du degré de gravité de l'infraction, de son étendue géographique et de la durée de participation de chaque membre.

En vertu de la communication de 2006 sur la clémence, la Deutsche Bank a bénéficié d'une immunité totale pour avoir révélé l'existence de l'entente et a ainsi évité une amende d'environ 21 500 000 €.

Les amendes infligées à chaque entreprise sont ventilées comme suit:

Entreprise

Amende (en €)

Deutsche Bank

0

Bank of America Merrill Lynch

12 642 000

Crédit Agricole

3 993 000

Crédit Suisse

11 859 000

 

Contexte des marchés obligataires

Les obligations sont d'abord émises sur le marché primaire en vue de leur vente aux investisseurs par le biais d'enchères ou de syndicats. Par la suite, les obligations sont négociées entre banques, courtiers et investisseurs sur le marché secondaire. Les obligations se caractérisent par l'identité de l'émetteur et par la devise dans laquelle elles sont libellées. Les tables de négociation des banques sont organisées en conséquence. Le terme d'«obligations SSA» est un terme générique désignant trois types d'obligations:

  1. i) les obligations supra-souveraines émises par des institutions ou agences supranationales, comme la Banque européenne d'investissement;
  2. ii) les obligations souveraines émises par des autorités centrales, mais soumises à un droit étranger et/ou dans d'autres devises que leur monnaie nationale (telles que les obligations émises en dollars des États-Unis par les États européens); ainsi que

iii) les obligations d'organismes publics (sous-souveraines) émises par des organismes publics et des autorités situées à un niveau inférieur à celui du pouvoir central, par exemple les banques de développement territorial.

Contexte procédural

L'article 101 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) et l'article 53 de l'accord EEE interdisent les ententes et les autres pratiques commerciales restrictives, y compris la collusion sur les prix d'achat.

L'enquête de la Commission dans cette affaire a débuté en août 2015 par une demande de clémence présentée par Deutsche Bank en application de la communication de la Commission de 2006.

Les amendes infligées aux entreprises qui enfreignent les règles de l'Union européenne en matière de pratiques anticoncurrentielles sont versées au budget général de cette dernière. Ces sommes ne sont pas consacrées à des dépenses particulières, mais les contributions des États membres au budget de l'Union européenne pour l'année suivante sont réduites en conséquence. Les amendes aident donc à financer l'Union européenne et à réduire la charge qui pèse sur les contribuables. Conformément à l'article 141, paragraphe 2, de l'accord de retrait entre l'UE et le Royaume‑Uni, cette affaire relève de la «compétence continue». L'UE remboursera donc au Royaume-Uni sa part du montant de l'amende une fois que celle‑ci sera devenue définitive.

De plus amples informations sur cette affaire seront disponibles sous le numéro AT.40346 dans le registre public des affaires de concurrence figurant sur le site web de la Commission consacré à la concurrence, dès que les éventuels problèmes de confidentialité auront été résolus. De plus amples informations sur l'action menée par la Commission contre les ententes sont disponibles sur son site internet consacré aux ententes.

Action en dommages et intérêts

Toute personne ou entreprise lésée par des pratiques anticoncurrentielles telles que celles décrites dans cette affaire peut saisir les juridictions des États membres pour réclamer des dommages et intérêts. La jurisprudence de la Cour et le règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil confirment que, dans les affaires portées devant les juridictions nationales, une décision de la Commission constitue une preuve contraignante de l'existence et du caractère illicite des pratiques en cause. Même si la Commission a infligé des amendes aux participants à l'entente concernés, des dommages et intérêts peuvent être accordés sans que le montant en soit réduit en raison de l'amende infligée par la Commission.

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